3 déc. 2013

Des nouvelles du Citron... (1)


photo : Karine Marco

Un premier retour, signé Joël Gayraud, sur Le Citron métabolique de Laurent Albarracin :
Écrit tout entier sur la tonalité de la possibilité rêvée, Le Citron métabolique exalte l'être-ici dans toute sa légèreté. Élégante et joyeuse façon d'en finir avec la pesanteur de l'être-là existentiel.
Philippe Annocque, quant à lui, donne un extrait du poème sur son blog Hublots

12 nov. 2013

Le Citron métabolique / Laurent Albarracin




titre : Le Citron métabolique
auteur : Laurent Albarracin 

Dessins de Karine Marco 

74 pages / 10,5 x 15 cm / intérieur papier bouffant / dos carré collé
isbn 978-2-912528-18-6 / éditions le grand os / collection Lgo 

parution : 15 novembre 2013

9 (+ 1,50 € frais de port)
 


extrait : 

citron
de contrition
joyeuse 


citron percé
obliquement
de son sens
obvie 


citron coupé
de telle façon
que sa face
fasse
pile 


que ses moitiés
tombées fassent
moteur 


que son tranché
le renverse 


que sa vision
le traverse 


ici
l’épi
de l’épée
qui l’épie 


ici
la fleur
du vase
de la fleur 


main
passée
dans la fleur
lors du bouquet
de l’offrande 


citron
par agglutination
du là autour
de l’ici


Le Citron métabolique est un poème qui interroge, comme dans la plupart des textes de Laurent Albarracin, la présence de l’objet. Il s’agit pourtant moins d’en cerner les contours dans une perspective pongienne, ou d’en avoir une approche phénoménologique, que de construire le lieu idéal et comme utopique de son apparition. Un certain esprit baroque et quelque chose qui serait du côté d’un fantastique métaphysique semblent animer cette écriture. À la fois ample et resserré (pressé comme un citron) le poème joue et se joue en effet sans cesse du caractère abstrait (au sens d’extrait) et en même temps très concret de la chose qui est ici le sujet du poème. À la fois édénique et localisée, défaite et recentrée (ou refaite et décentrée) par les images que ce citron suscite, la chose en question est soumise à rude épreuve et ce que les philosophes nomment son ipséité, ou plus simplement son caractère irréductible, semble voler en éclats qui sont autant de flèches qui le désignent et le percent de nouveau. Au terme de la lecture on a l’étrange sentiment que le « citron » s’est transformé, mais qu’il s’est transformé en lui-même. 


Revue de presse :

Attention, le citron n’est pas le support du poème (comme chez Francis Ponge), mais bien sa matière. Il est transformé plutôt que révélé. Toutefois, cette transformation s’inscrit dans un cycle : il donne la matière pour créer le texte, et le texte retourne au citron. 
Périne Pichon, Libr-Critique, 4 avril 2014. Article complet

Ici, maintenant, un citron se démène, se tortille, se trémousse. Le désir de l’auteur de réduire les choses à ce qu’elles sont se trouve aux prises avec l’exubérance incontrôlée des choses. Avec leurs accointances au monde.
Anne-Marie Beeckman, "Un Citron pressé de dire", in L'Impromptu n°12 (janvier 2014). Article complet

On ne sort pas du mot, pas de la chose non plus, au contraire. On n’en sort pas —définition de l’immanence ?— mais par mille détours, mille voyages. Citron métabolique, comme métamorphoses d’Alice. Loin de la dichotomie pongienne parti-pris des choses (muettes) / compte tenu des mots (la langue, la mère-patrie presse-tige du père-patriote), Albarracin tente l’aventure d’une entrée dans la chose par l’incision, par l’incidence du mot.
François Huglo, Sitaudis.fr, 24 janvier 2014. Lire l'article 

On se laisse porter par les répétitions qui tournent la tête et retournent la langue comme un gant jusqu'à nous faire habilement entrevoir et saisir un instant ce qui luit furtivement dans le noir. L'"ici" est le pépin qui innerve tout le texte. 
Note de lecture, in revue Contre-allées, n°33/34 (automne-hiver 2013) 

Écrit tout entier sur la tonalité de la possibilité rêvée, Le Citron métabolique exalte l'être-ici dans toute sa légèreté. Élégante et joyeuse façon d'en finir avec la pesanteur de l'être-là existentiel.
Joël Gayraud


Laurent Albarracin (1970) commence à publier ses poèmes vers la fin du siècle dernier, dans de petites structures éditoriales : ces premiers textes seront pour l’essentiel réunis dans Le Verre de l’eau (Le Corridor bleu, 2008). Parallèlement, il participe à l’aventure du Jardin ouvrier, la revue d’Ivar Ch’vavar (1995-2003). Il a publié plus récemment Le Secret secret (Flammarion, 2012), Résolutions (L’Oie de Cravan, 2012) ou encore Le Ruisseau, l'éclair (Rougerie, 2013). Il est également l’auteur de deux études sur Louis-François Delisse (2009) et Pierre Peuchmaurd (2011) aux éditions des Vanneaux. Il a obtenu le prix Georges-Perros en 2012. Il anime les éditions Le Cadran ligné et tient une chronique de poésie sur le site de Pierre Campion

De Laurent Albarracin, Le grand os a également publié, dans le numéro 5 de la revue LGO une série de poèmes inédits, intitulée Res Rerum


8 nov. 2013

Salon Vivons Livres ! 2013 / Toulouse



le grand os sera à Vivons livres ! salon du livre Midi-Pyrénées (espace éditeurs)
au Centre de congrès Pierre Baudis à Toulouse

samedi 23 novembre de 10 h à 20 h 
dimanche 24 novembre de 10 h à 19 h 
nous présenterons à cette occasion les livres récemment parus dans la collection Lgo : Le Citron métabolique de Laurent Albarracin (dessins de Karine Marco) et Tchoôl ! de Christophe Macquet, ainsi que les derniers livres d'artistes de Valeria Pasina
on pourra également rencontrer sur le stand l'éditeur et peintre Jean-Pierre Paraggio, cheville ouvrière de la Collection de l'umbo 

1 nov. 2013

Le Citron métabolique / premier zeste


dessin : Karine Marco

Premières strophes du Citron métabolique de Laurent Albarracin, en attendant la parution, imminente, du livre dans la collection Lgo. 

il y aurait un ici
qui serait
un peut-être
arrivé

ce serait un ici
de là
en là

pas du tout un pourquoi

plutôt un
plutôt

ce serait un ici
avec des incidences
ici

avec des pépins
comme des ballons

un ici
dans son jus

citron
par hasard
et dénomination

en tout cas
un toujours
de circonstance

ce ne serait pas 
l'ici de tout

juste l'ici
d'ici

celui
de nul autre ailleurs

citron quand bien même
nuage se fasse 

(...)

Laurent Albarracin 

26 oct. 2013

L'Autre Livre 2013 / Salon / Paris



Le grand os vous attend au salon international des éditeurs indépendants, L'Autre Livre, qui se tiendra à l'Espace des Blancs-Manteaux, dans le Marais à Paris, du vendredi 15 au dimanche 17 novembre 2013

On pourra rencontrer sur notre stand (C44-46) l'écrivain équatorien Huilo Ruales Hualca, auteur des Poèmes noirs et, à partir du samedi, le poète Laurent Albarracin, à l'occasion de la parution de son Citron métabolique aux éditions Le grand os. On pourra aussi découvrir sur notre table Le Cadran ligné, les éditions qu'anime ce dernier.


L'Autre Livre

Espace des Blancs-Manteaux

48 rue Vieille-du-Temple

75004 Paris 

(Métro Hôtel de Ville)

Entrée gratuite 



vendredi / 14h-21h

samedi / 11h-21h

dimanche / 11h-19h 

 


27 sept. 2013

À propos de Tchoôl ! (3)


© Christophe Macquet

Une longue et vigoureuse chronique de Romain Verger sur le site L'anagnoste à propos de Tchoôl ! de Christophe Macquet. Court extrait :

" (...) Tout au long de ce long poème, Macquet joue avec les codes du récit pour mieux le court-circuiter, lui évitant de se noyer dans "l'eau lénitive et concertée" du roman. Entre deux accroches narratives surgissent des saillies poétiques, de longues coulées torrentielles entraînant tout sur leur passage (visions, rencontres, dialogues...), dans une esthétique du "qui-vive", du "pêle-mêle", fait d'"assemblages" et de "découpes à l'emporte-pièce", une véritable "colique déclarative" prise en charge par un "causeur paratactique". On file à toute allure, on pose rarement ses valises, comme pour éviter à l'encre de sécher et aux mots de cailler. Seul un rêve ou un malaise d'Avine ralentissent le tempo avant que tout ne redémarre au quart de tour. Tchoôl! est un poème à perdre haleine."
Lire l'article dans son intégralité

30 août 2013

Cri & co 2 / En Compagnie des Barbares



Un spectacle théâtral proposé par la compagnie En Compagnie des Barbares, d'après "cri & co", un livre de Christophe Macquet (éd. Le grand os, 2008) et suivi du "Tarot des fétiches", une lecture pour un spectateur, d'après le tarot de Karine Marco et les poèmes d'Ana Tot. C'est du 17 au 21 septembre 2013 au Théâtre du Pont Neuf à Toulouse.


3 juil. 2013

À propos de Tchoôl ! (2) et de Macquet photographe (2)


Où l'on parle de Tchoôl ! dans une brève du Matricule des Anges :
Voyageur et photographe, Christophe Macquet traque l'image jusqu'à la Terre de Feu, marquant une prédilection pour les ciels, les matières, la réalité abordée par morceaux authentiques. Après Cri & Co, Kbach et Luna Western, son nouveau récit, Tchoôl, relate son entrée au Cambodge, où il a passé dix ans avant de s'installer à Buenos Aires. D'abord publié en 2005 dans la seconde série de La Main de Singe, sous le nom de Christophe Antara, il s'intitulait La Réincarnation des amibes. On y trouve à nouveau un monde rugueux, les sonorités déroutantes et le tourbillon qui happe le voyageur : "Quand Avine reprend connaissance, il est allongé dans un parc, à poil / des centaines de badauds font cercle autour de lui, goguenards (sa peau ravagée d'éphélides)". Comme un descendant de Cendrars, peu enclin aux chichis et aux esthétismes racoleurs, Christophe Macquet a choisi la voix brutale pour raconter ses histoires. Vraies, "et raides" avec ça.
Eric Dussert. Le Matricule des Anges n°144 (juin 2013)

photo : C. Macquet

Puisqu'il est question de photographie et de voyage, on en profite pour signaler la parution en ligne, sur le site D-Fiction, d'un essai de Xavier Boissel consacré aux photographies de Christophe Macquet : Le silence de l'oiseau. Extrait : 
(…) Comme pour les textes qu’il écrit, les photographies de Christophe Macquet ressortissent à une entreprise de liquidation : il s’agit d’en finir avec le trafic des identités. « Le langage manque parce que le langage est fait de propositions qui font intervenir des identités », écrit Georges Bataille. Ce sont les chaînes du langage (copule, prédicat) qu’il faut briser ; c’est le mur des langues qui doit être traversé. De même, c’est à la judication des images que Christophe Macquet tente d’échapper, d’où, chez lui, une pratique fuyante du medium photographique, qui affirme – au même titre que sa pratique du langage – son inadéquation foncière avec le monde. Ses photographies résistent à toute synthèse, à toute adjectivation, à tout énoncé définitoire (…)
Xavier Boissel. Lire l'article complet sur D-Fiction 

15 mai 2013

À propos de Tchoôl ! (1)

© Christophe Macquet

Un bel article de Typhaine Garnier consacré à Tchoôl !, le dernier livre de Christophe Macquet, est en ligne sur le site de poésie contemporaine Sitaudis. En voici un extrait :
(…) Ce qu’on voit d’abord dans Tchoôl ! c’est une forme, étrangement découpée, ou plutôt : élastique. Le texte est tantôt concentré en paragraphes, tantôt s’étire en filaments, en espèce de vers. Hybride, l’écriture l’est aussi par le mélange de récit et de notes brèves non articulées. La narration en bonne et due forme (« roman roulant son eau lénitive et concertée ») ne tient jamais longtemps : la phrase se délite rapidement et poudroie ou tourne court, le « héros » est mis hors d’état de vivre une aventure.
(…) l’extérieur attaque de toutes parts et pulvérise le discours ; la perception est toujours fragmentaire, avec rapides changements d’échelle et effets de zoom haute définition. Ce chaos produit un effet de réel en même temps qu’une étrangeté comique (« la chaussée défoncée, les irruptions nouvelles, [...] les hibiscus, les ascaris, la rouille et le droit d’exister »). Choses vues, senties, entendues, mouvements et qualités se précipitent en un jaillissement continu, scandé par le retour tragi-comique d’éléments obsessionnels. 
Pour autant, l’écriture ne nous donne pas l’illusion d’être de plain-pied avec le réel, ni au contact d’une « intériorité ». Nous ne sommes ici nulle part ailleurs que dans une langue étrangère, « une langue ancienne de chien broyé, [...] une langue ancienne familière-incompréhensible ».
LIRE L'ARTICLE COMPLET

De la patte de Typhaine Garnier toujours, et toujours sur Sitaudis, et toujours aussi inspirée, on pourra lire également la note de lecture de L'amer intérieur d'Ana Tot, paru chez nos confrères de la Collection de l'umbo. En suivant ce lien

12 mai 2013

Marché de la Poésie 2013 / Paris



Pour la septième année consécutive, Le grand os vous donne rendez-vous en plein air au Marché de la poésie, place Saint-Sulpice, dans le 6e arrondissement de Paris, du jeudi 6 au dimanche 9 juin 2013.
 
Nous présenterons, sur le stand 205-207, une sélection de livres d'artistes ainsi que les ouvrages de littérature et de poésie du Grand os, et tout particulièrement les nouveautés : le livre de Christophe Macquet, Tchoôl !, et l'anthologie bilingue de l'écrivain équatorien Huilo Ruales Hualca, Poèmes noirs / Poemas negros.

30 avr. 2013

À propos de Poèmes noirs (1)


(Equus quagga)

Voici la note de lecture que Michel Ménaché consacre aux Poèmes noirs dans le numéro 1009 de la revue Europe :

Huilo RUALES HUALCA : Poemas negros
traduit de l’espagnol par Aurelio Diaz Ronda, éd. Le grand os, 17 € 
Poète équatorien, né en 1947 à Ibarra, Huilo Ruales Hualca navigue depuis près de trente ans entre « l’asile de fous » (L’Amérique latine) et « la maison de retraite » (l’Europe). Il a reçu à Paris en 1983 le prix de littérature hispano-américaine Rodolfo-Walsh mais c’est seulement aujourd’hui qu’il est publié en français. Le traducteur, Aurelio Diaz Ronda a rassemblé des poèmes de trois recueils : L’ange du gasoil (1999), Pavillon B (2006) et Croupe de zèbre sans rayures (2012).
D’un lyrisme rageur, sulfureux, ces poèmes cultivent la provocation, l’autodérision, l’électrochoc émotionnel, en images fortes, subversives, tantôt marquées d’un expressionnisme cru, voire cruel, tantôt d’un surréalisme fantasmagorique, insolite et fulgurant… 
Dans L’ange du gasoil, le poète (têtard d’ange) se joint à tous les apatrides, s’élance au-dessus du chaos : « je ne suis pas le soleil malgré mes ailes de gasoil. » Cri de révolte contre la barbarie du désordre établi dont sont victimes les enfants persécutés, à l’abandon : « j’ai vu déféquer la police du monde / sur les enfants couleur thé. » Evocation sordide des bas-fonds, visionnaire, exacerbée par le brouillage sensoriel : « j’ai vu un ruffian se faire ronger par les enfants bleus / qui bâtissent avec leurs cœurs de loup une cité secrète /  dans les égouts de Bucarest // j’ai vu et continue de voir l’arôme crématoire de la chair / le goût à chevelure brûlée de l’air…» 
Le second poème de Pavillon B annonce dès le titre la fureur de dire : Une envie de tuer sur le bout de la langue ! La morbidité baroque des images mêle le feu et le sang : « je suis un ange qui a appris l’alphabet dans le feu [...] je suis une goutte de sang sur une tête égorgée. » Parole inspirée et dévastatrice, délire lyrique avec des touches d’humour noir : « le médecin me dit de ne pas manger les nymphes sans les déplumer. »
Toujours en partance pour « mourir de faim grâce à la poésie », dans Croupe de zèbre sans rayures, fuse l’autodérision grinçante : « Toi rêver ? Ne me fais pas rire ou je vais encore perdre mon dentier… » Mais derrière le masque bouffon, la loufoquerie épique, la parodie, perce la souffrance originelle : « j’ai besoin de mettre dans un poème cette forêt incendiée que fut mon enfance / j’ai besoin d’évacuer le tumulte qui est passé sur moi comme une / légion de soldats de plomb aux sphincters abîmés... » L’Europe serait-elle une terre d’asile pour l’auteur ? Aucune idéalisation en dépit de l’attrait. Macabre et fascinante, il la décrit comme « une maison de retraite où l’on fabrique des têtes de mort avec des dents en or. » Et s’il aime les villes nouvelles, c’est que « les assassins y sont joyeux » et que, « en général les villes nouvelles se déshabillent d’un coup / révélant sans la moindre pudeur, presque avec méchanceté, / le mécanisme complexe de leurs prothèses. » Jack Kérouac, Antonin Artaud, Malcom Lowry, fantômes tutélaires traversent en lévitation la poésie  de Huilo Ruales Hualca : « Malcom Lowry boit avec la ferveur du suicidaire rescapé qui a peur d’être éternel. » Autre rencontre mémorielle, apatride, de la noirceur existentielle : « J’ai passé mes nuits dans la rue où a vécu Cioran […] rue qui traverse une infinité de fois le monde…» Entre dégoût sarcastique et sensualité avide, les mégapoles exercent leur attraction. Mais de désillusions amères en fulgurances nihilistes, Moscou, Istanbul, Paris, Varsovie, et autres monstres urbains pavent des pires intentions « les sept enfers de [la] divine comédie » du poète équatorien.
Dans un monde où tout est normalisé, falsifié, « le langage castre, ment, salit, usine, standardise, évide / Le langage tue… » La poésie elle-même, « avec ses griffes », n’est pas épargnée dans ce jeu de massacre : « Pourquoi pleures-tu maman, papa est déjà mort. / Parce que tu es vivant […] Parce que tu as découvert la page blanche / Parce que la page blanche est le portail de l’abattoir / Parce que la page blanche est un asile de fous endormi… » Huilo Ruales Hualca fraternise aussi avec Gamoneda qu’il lit un jour à voix haute dans le métro face à des passagers abasourdis ou en larmes !
On retiendra enfin ce très beau poème composé de variations sur le passage d’une langue à l’autre : De l’érotique de la trahison de la traduction. Jonglerie verbale qui célèbre les potentialités et les fécondations nées de la traversée des langages : « Deux langues faisant d’un seul poème deux poèmes / Deux langues se cherchant dans le corps d’un poème / Deux langues s’éloignant dans le corps d’un poème […] Que la voix de ma langue envahisse le silence de ta langue… »
Le pessimisme de ces Poèmes noirs est paradoxalement jubilatoire. Derrière la dérision subversive et la morbidité mortifère perce une humanité sensible d’écorché vif, une avidité d’être avant de disparaître... Le mérite de la traduction est d’avoir rendu cette poésie palpable, avec ses jongleries nonsensiques, ses licences orthographiques, ses métaphores déjantées, sa fièvre existentielle… En témoigne l’autoportrait désintégré sur lequel Huilo Ruales Hualca laisse le lecteur : « mon visage de poète est un miroir en miettes. / Mon charme est autiste. / Ma mémoire un cimetière cosmique…»

Michel MÉNACHÉ (Europe n°1009, mai 2013)

22 avr. 2013

À propos de LGO 5 (1)



Sous la forme d’un carnet spiralé avec une élégante jaquette, format carré, typo variée mais sobre, une revue 100% poèmes si l’on reprend pour soi la proposition 5 de En guise d’artpoétique de Huilo Ruales Hualca, le poète équatorien traduit par Aurelio Diaz Ronda : « La poésie est mouvement. Le reste, c’est de la prose »*. Ainsi, si l’on se laisse aller à la mobilité, L. Albarracin vous révèle avec Res rerum les 22 arcanes majeures de la Réosophie qui est la gnose des choses et la vraie science des objets, C. Macquet joue de l’ambiguïté du fameux « Traduttore traditore » au-delà même des connus renversements borgésiens, J-F Magre joue de l’envoi postal dans une polysémie de réécritures parodiques de l’échange intime, S. Vizcaino offre deux poèmes dont la dimension tragique, en presque clôture du volume, laisse place à G. Mar, Le long du fleuve, extraits comme en miroir des douleurs qui précèdent.
Yves Boudier, CCP (Cahier Critique de Poésie) n° 25 (mars 2013)

* En fait, la citation est attribuée par H. Ruales Hualca à l'anti-poète Nicanor Parra (photo)


Merci à notre limier anonyme (il se reconnaîtra) qui, au prix de multiples dangers, a obtenu copie de cette note de lecture.

4 avr. 2013

Tchoôl ! / Christophe Macquet




titre : Tchoôl !
auteur : Christophe Macquet

96 pages / 10,5 x 15 cm / dos carré collé
isbn 978-2-912528-17-9 / éditions le grand os / collection Lgo 
avec deux photographies noir & blanc de l'auteur 

parution : 4 avril 2013

9 (+ 1,50 € frais de port)  

ACHETER


ce qu'ils en pensent : 

"L’extérieur attaque de toutes parts et pulvérise le discours ; la perception est toujours fragmentaire, avec rapides changements d’échelle et effets de zoom haute définition. Ce chaos produit un effet de réel en même temps qu’une étrangeté comique." 
Typhaine Garnier. Sitaudis (14 mai 2013). Lire tout l'article 

"Comme un descendant de Cendrars, peu enclin aux chichis et aux esthétismes racoleurs, Christophe Macquet a choisi la voix brutale pour raconter ses histoires. Vraies, "et raides" avec ça."
Eric Dussert. Le Matricule des Anges n°144 (juin 2013). Lire l'article 

"C'est déstabilisant, comme tout ce qu'écrit Macquet (on a l'impression de tourner sans fin dans le tambour d'un lave-linge), mais ô combien grisant. (…) On retrouve là l'énergie si propre à son style trépident, ces trémulations caractéristiques de sa poésie incisive et survoltée." 
Romain Verger. L'anagnoste (26 septembre 2013). Lire l'article  
 

extrait :
" il se lève avec le soleil

le cou endolori mais très en forme

des années qu’il n’a pas dormi comme ça, sans cahots, sans ratures, sans frapper dans les murs, dans l’esquive aux ailes de moiteur, aux froufrous démultipliés, les moustiques ont bien bu, une goutte, à peine, ils zigzaguent bas gravides, rougis par le sang du rouquin, de juste, rassasiés éphémères, dans l’actu de la brume indivisible, Avine fait quelques étirements de hanche, se dirige (tout guilleret) vers la cabane en tôle qui fait office de toilettes et lâche dans l’étang son dernier colombin français 
tu veux l’herbe ou la femme ? lui demande en français monsieur Douze, le tenancier, qui pense avoir senti son homme et qui mime assez tristement la connivence, Avine lui tend son dollar, et l’autre recompte sur le bout d’un doigt spatulé, sensible, il n’a pas la sécurité sociale, son frère est mort de l’encéphalite japonaise, l’année dernière, la crémation fut lente, les touristes ont peur du pays, on dit que les chasseurs de fiel humain rôdent encore autour des villages, quand la lune fait peau neuve, on dit qu’il vaut mieux ne pas voir, que ça donne la conjonctivite, il y a cinq ans, sa deuxième femme, avec le chef de la commune qui a les joues grêlées par la petite vérole, un hélicoptère passe, les touristes ont peur du pays, mais il y en a qui viennent de temps en temps, et puis qui disparaissent, on est gentil, tu veux l’herbe ou la femme, ce n’est pas mon tatouage, qui me sauvera s’ils reviennent, on est cruel, on peut travailler des lombaires et des zygomatiques depuis l’enfance, c’est beau quand même, les échaliers de bambou, les aigrettes au long cou sur le talus des rizières, et puis l’eau vive, les touristes ne sont pas comme nous, les ramboutans, les coupures de courant, l’éléphant qui s’affole, la descente de l’huile du désir, qui dégoutte dans son œil, qui dévaste la scène, les chiens aboient, on les bâillonne, on leur grave un ultime message, en lettres mercenaires, juste au sommet du crâne, c’est magique quand même, les agaves dodus, les cactus à raquettes, les euphorbes, les kalanchoés, qu’on vole, dans les plates-bandes du voisin, l’année prochaine, le chef de la commune qui vient raconter ses salades pendant que nos filles aiguisent leurs couteaux, tu pars ?

ça va, ça va, je ne suis pas un acteur, encore moins un boucher, Teresa y’a pas si longtemps, et la feuille de troène (il pouvait en mâcher un nombre incalculable en rentrant de l’école), c’est dingue, les silences indigènes sont encore plus bavards que les silences de Teresa, j’ai le goût du troène dans la bouche, j’ai le goût du genêt du froid des garennes, des tritons dans les mares, des blockhaus et des goélands qui s’écrasent au pied des falaises, monsieur Douze au revoir ! on ne paie pas l’herbe, il faut marcher ! mais j’aimais ta façon de dire « l’année prochaine »
"


Christophe Macquet est né en 1968 à Boulogne-sur-Mer. Il vit à Buenos Aires, en Argentine, depuis 2006, après avoir passé dix ans en Asie, essentiellement au Cambodge. Il a publié Luna Western (Buenos Aires : éd. Paradiso, 2011) — dont la revue LGO donne de larges extraits dans son numéro 5


Du même auteur aux éditions Le grand os :

cri & co (2008) 

KBACH (2012) 

18 mars 2013

Tout a une fin / video


" Ce qui est dit à la fin est ce qui arrive en dernier est ce qui est dit en dernier. Si ce qui est dernier n’est pas dit ce qui arrive en dernier coupe. Alors ce qui est dit à la fin est ce qui est arrivé en avant-dernier. Toute fin comme tout commencement et peut-être plus que tout commencement est notable est davantage visible est regardable est plus présente…" 




(cliquer sur ce lien pour voir la video sur VIMEO)
 
un film video de Frédéric Clanet autour d'une lecture-performance de Pasina et cie, le 11 mars 2011 à Toulouse, lors de la 3e édition de feu le festival Les Perforeilles


tout a une fin / Pasina & cie

textes : Ana Tot et Aurelio Diaz Ronda

habillage, mise en scène et en mouvement : Valeria Pasina

avec Emilie Bousquet, Céline Couronne, A. Diaz Ronda, Alfonsina Faya, Ximena Faya, V. Pasina, Colin Pasquier et Jérôme Quercia

20 févr. 2013

Tchoôl !, entrée en matière


Avec Tchoôl !, à paraître dans les prochaines semaines dans la collection Lgo, se clôt la "trilogie cambodgienne" de Christophe Macquet, dont Cri & co et KBACH, également publiés par Le Grand Os, constituent les deux autres volumes. L'auteur en a-t-il fini pour autant avec le pays khmer, où il a vécu dix ans ? En 2006, notre baroudeur a troqué l'Asie pour l'Amérique du Sud, faisant de Buenos Aires son nouveau port d'attache. C'est de là qu'il nous fit parvenir en 2011 un Luna Western (Paradiso ediciones) tout ce qu'il y a de plus argentinesque et, à sa façon — c'est-à-dire réellement — borgésien. 

Christophe Macquet. La Leona, Patagonie, janvier 2013

Mais revenons à Tchoôl ! (en khmer : "entrer, pénétrer, à l'attaque…"). Où l'on retrouve Avine, le double géant et roux du narrateur, à son arrivée (son "entrée") en terre asiatique… Sur une durée narrative de quelques heures, quelques jours au plus, le récit s'enroule et concentre en lui — dans une prose déroutante de fluidité et de mystère, précise, complexe, vibrante comme une dentelle organique — plus d'une décennie d'expériences et de sensations futures… Où l'on détricote un passé boulonnais soudain mis à distance par "le vol MH493"… Où l'on accompagne Avine qui "lâche dans l'étang son dernier colombin français" pour mieux se retrouver dans l'ombre, à son tour, de son double installé


Une première version du texte a paru en deux livraisons dans la revue La Main de Singe en 2005, sous le titre "La réincarnation des amibes" et la signature de Christophe Antara, alias Macquet.

Nous donnons ci-dessous les premières pages de ce retour sur des premiers pas en étrangeté, premiers frottements avec les figures, couleurs, sons, sens, rythmes de la ville cambodgienne et d'un soi transporté en territoire inconnu, donc pénétrable. Tchoôl ! À l'attaque ! 
 
Photo : Christophe Macquet, 2005


Tchoôl ! (extrait)  



 


Avine en avion

le vol MH493

en classe économique

en musoir avancé

la pluie qui tombe

la pluie qui tombe

en mythobézoarchibermiphiscoté sous quinzaine
 
Avine

il a froid

il est grand

la pluie qui tombe

il est trop grand

ses genoux lui rabotent les mâchoires, sous la casquette, un visage sans viande, un œil à travers le hublot, il voit les parcelles de la France, bien ordonnée, comme au fond de la mer, sous les nuages, une oreille à l’affût, toujours la plainte des Lulutes à Jésus Flageolet

guesh thorkeyrig xùa curyé
huigneu ma lingueu ross’
et raide !

l’autre œil
 

l’hôtesse malaise a le chignon des nuits

une cicatrice brune, enfouie sous le duvet de la nuque, les hanches suffisamment larges, Avine a mal au dos, il reste au moins douze heures, le bourdon des Lulutes va s’apaiser, j’espère, s’aboliront dans la terre étrangère, le miel à l’entrejambe

l’hôtesse et l’abeille inouïe

priyush hüé pel appaj mù
zavé min tien galand Macquet
et raide !

dans l’autre oreille

Avine entend la pluie qui tombe sur le phare de la Horce, sur le gothique Saint-Greval, dans les oyats de la dune surplombant le schorre (dans les oyats de la dune surplombant le schorre), dans les douves où la mousse se remémore encore
 
piùrey mà dip olax holboq
ça la baldec à la croix lauf’
et raide !

c’est un voyage sentimental et plein de .... qui sifllent

Avine a du courage, Avine a mille euros sur un compte

il sait qu’il n’a plus rien à perdre depuis qu’il ne lit plus les livres, depuis que Teresa baise avec le gros Charles, depuis que Pépé Jean-Baptiste a cassé sa pipe à Alprech

hora zap gùl dayang kaou
croupi meu din l’tir fond
et raide !

c’est le chien de Matante, Tino, qui l’a mis sur la piste

un teckel à poils durs
 

rogue et teigneux en diable

c’était à deux heures du matin, les maîtres étaient couchés, il a compris dans son œil (l’œil du pauvre basset), à sa respiration patiente…, qu’il fallait partir au plus vite, Tino, le terrible secret quand les maîtres s’endorment, la lune évanouie, les mouches qui crépitent sur le sol, le vent stupide, le pin des Landes qui gigote au bout du jardin, et cet Avine, ce grand benêt d’Avine, qui ne veut pas dormir

(…) "

17 févr. 2013

Lecture de Huilo Ruales Hualca

Retour en images sur la rencontre avec Huilo Ruales Hualca et ses invités, le 2 février dernier dans les salons du Grand Os. Merci à tous les participants et particulièrement à Eric Poirette pour ses photographies.





27 janv. 2013

Carte blanche aux Poèmes noirs

 
samedi 2 février 2013 à 20 h 30
Le Grand Os reçoit dans son salon 
l'écrivain équatorien
Huilo Ruales Hualca
 
 
à l'occasion de la parution de
traduit de l'espagnol par Aurelio Diaz Ronda 
 
rencontre et lecture bilingue
avec l'auteur et le traducteur
suivies d'un verre et d'une collation

entrée libre
dans la limite des places disponibles 

Le Grand Os / 7 rue Charles Baudelaire / Toulouse (F-31200) 
réservation recommandée / tél : 05 61 63 64 04
 

23 janv. 2013

Collection de l'umbo



Publication confidentielle diffusée pour une seule lèvre et pour dans mille ans, l'umbo est un divertissement confidentiel et une rêverie, l'ébauche nonchalante d'une revue. L'umbo est un passe-temps paradoxal : réunir et partager avec quelques complices, un choix d'empreintes et d'affirmations poétiques, pour le seul plaisir ; interroger le grondement des nuages – tant qu'il dure – et soumettre à la question sa propre nécessité. Si rien ne va de soi c'est pourtant l'évidence qui est visée…  
Hans-Peter Paragem 

 
Dans la série Passage du sud-ouest, la Collection de l'umbo publie des plaquettes de poésie à la facture élégamment modeste. En 2012, parmi d'autres, deux auteurs chers au Grand Os y ont été publiés :
 
• Ana TOT, L'amer intérieur (Luca l'irascible)

À lire : la chronique de Typhaine Garnier sur Sitaudis.
 
• Laurent ALBARRACIN, Le poirier, avec des dessins de Pierre Bessompierre. 
 
On peut commander ces ouvrages au prix,
respectivement, de 4 et 5 euros (frais de port compris) en se rendant sur le site de la Collection de l'umbo

19 janv. 2013

Huilo Ruales Hualca en chair, en os et en membrane



À lire, deux extraits des Poèmes noirs sur Membrane, le blog foisonnant de Romain Verger. 

Huilo Ruales Hualca et son traducteur, Aurelio Diaz Ronda, donneront une lecture bilingue des Poèmes noirs à la Maison du Grand Os à Toulouse, le samedi 2 février 2013. Une occasion unique d'écouter et de rencontrer l'écrivain équatorien avant qu'il quitte la France pour plusieurs mois. Plus de précisions très bientôt et ici-même. 

12 janv. 2013

Prochainement sur vos écrans




Bande-annonce de Minuit passé 
un film video de Jean-François Magre 
avec Michel Turquin (2012) 

« Ceci n'est pas un rêve, mais le monde des images lui-même entraînant l'esprit où il n'aurait jamais consenti à aller, le mécanisme en est à la portée de tous. »
Antonin Artaud, texte de présentation du film La coquille et le clergyman de Germaine Dulac.

« Le rêve procédait à une véritable déconstruction de l'univers du dormeur et à une fabrication de "mondes possibles". Autrement dit, le rêve est un inlassable fabricant d'hypothèses. C'est là sa principale dynamique. Il puise évidemment ses matériaux dans l'expérience du rêveur, ses perceptions, ses pensées, ses souvenirs -ses problèmes, surtout ! Il fragmente ces matériaux en éléments discrets et les recombine en assemblages nouveaux qu'il présente au dormeur comme des scènes vécues, ainsi que l'on projetterait un film. De là, cette sensation d'étrangeté. Il est à la fois expérience intime, mais aussi externe puisque le rêve est perception. »
Tobie Nathan sur La nouvelle interprétation des rêves, Libération NEXT n°36.


Voir une autre video de Jean-François Magre sur le blog du grand os.

8 janv. 2013

Brea et Macquet sont sur un bateau…



À lire sur Hublots, le blog de l'écrivain Philippe Annocque, un extrait de KBACH de Christophe Macquet et un poème d'Antoine Brea tiré de Simon le mage


Pour rappel, sur notre site :
  
Simon le mage, d'Antoine Brea. Ed. Le grand os, 2009.

KBACH, de Christophe Macquet. Ed. Le grand os, 2012. 

6 janv. 2013