2 déc. 2015

Muerto Coco & Le Grand Os / Toulouse / 8 déc.




Cave-Poésie, Toulouse
Mardi 8 décembre 2015 à 19h30

collectif marseillais dédié à la poésie contemporaine
propose une lecture musicale
de textes publiés par les éditions Le Grand os

dans le cadre des Rugissants

entrée : 5€ 
(10€ avec le spectacle qui suit) 

22 nov. 2015

Folies de livre 2015 / 4-5 déc / Mérignac (Gironde)



Le Grand Os vous attend à 

Folies de livre 2015 
Triennale du livre d'artiste 

SALON-VENTE
10 artistes & éditeurs 
à la rencontre du public sur le thème de la matière
 
Vendredi 4 décembre de 13h à 19h
Samedi 5 décembre de 10h à 17h 
entrée libre
 
Médiathèque municipale de Mérignac 
19, Place Charles de Gaulle
33700 Mérignac
Tél. : 05 57 00 02 20
 

2 nov. 2015

Salon L'Autre Livre 2015 / Paris




Le grand os vous attend sur le stand D-07 au 13e salon international des éditeurs indépendants, L'Autre Livre, qui se tiendra à l'Espace des Blancs-Manteaux, dans le Marais, à Paris, du vendredi 13 au dimanche 15 novembre 2015

À l'occasion de la parution du recueil Ainsi fut fondée Carnaby Street de Leopoldo María Panero, rencontre-lecture autour de l'œuvre du poète espagnol disparu l'an dernier, animée par ses traducteurs, Victor Martinez et Aurelio Diaz Ronda, le samedi 14 novembre de 18h à 19h dans la salle de conférence, au 1er étage de l'Espace des Blancs-Manteaux.
  


Salon L'Autre Livre


Espace des Blancs-Manteaux


48 rue Vieille-du-Temple


75004 Paris 


(Métro Hôtel de Ville)



Entrée gratuite 





vendredi 13 / 14h-21h


samedi 14 / 11h-21h


dimanche 15 / 11h-19h

22 oct. 2015

À propos de "Ainsi fut fondée Carnaby Street" (2)



Julien Delorme, sur le site Addict-Culture, donne sa lecture de Ainsi fut fondée Carnaby Street de Leopoldo María Panero (Le Grand Os, 2015). Extrait et lien vers l'article :
Le recueil est composé de textes courts (de quelques mots à une page et demie) et puissants. Ne s’encombrant pas de cohérence, l’auteur alterne listes, collages saccadés et scénettes comme extraites de la littérature pulp la mieux troussée. On ne trouvera certes pas de lien direct dans l’écriture de Panero – expérience limite –, mais bien des jeux de réponse d’un texte à l’autre, et surtout une manière tout à fait singulière d’emprunter des thématiques, des motifs et des personnages de toutes origines. Le recyclage des fantasmes et des influences est total et le monde de Panero ressemble à ces coffres de jouets dépareillés permettant aux enfants d’improviser des histoires avec une poupée, un GI Joe et trois petits soldats…
Julien Delorme. Lire l'article complet

Ainsi fut fondée Carnaby Street, de Leopoldo María Panero
Traduit de l'espagnol par Victor Martinez et Aurelio Diaz Ronda. Le grand os, 2015 


21 sept. 2015

Ainsi fut fondée Carnaby Street / Leopoldo María Panero




titre : Ainsi fut fondée Carnaby Street 
auteur : Leopoldo María PANERO 

traduit de l'espagnol par Victor Martinez et Aurelio Diaz Ronda 
postface de Victor Martinez 


88 pages / 13 x 18 cm / dos carré collé 
couverture à rabats (dessin : Luciano & Milo - conception graphique : t2bis)
isbn : 978-2-912528-22-3 / éditions le grand os / collection Qoi 

titre original : Así se fundó Carnaby Street (1970)


parution :  21 septembre 2015 

12 € (+ 1,50 € de frais de port) 


La poésie tranchante et tendre de la mort du rêve dans la dissolution mercantile, entrevue dès 1970.  
Hugues Robert 


4e de couverture

" C’était l’hiver. Certains personnages du monde sillonnaient la ville. Pergolèse, les trafiquants et la Belle au Bois Dormant racontent qu’ici, pendant un temps, un « désir d’être peau rouge » s’empara de nous. Il ne reste plus de tout cela que les « Enfants Perdus » qui, au « Pays du Plus Jamais », permirent de fredonner des hymnes aux rêves « mieux que la réalité ». Des gens qui ne se connaissaient pas entendirent la rumeur d’un livre – enfin, il y avait un livre ! Un certain Flash Gordon et un certain Roger Waters se mirent en contact ; une fille de la Gran Vía et Antonello de Messine devinrent de très bons amis ; la reine des Chats et Bonnie and Clyde firent un voyage ensemble. C’est alors qu’il y eut des messages et des appels, des mots de passe. Le Balafré était arrivé au village sans écharpe rouge et sans arguments. Tout le monde le savait : c’était un jeune poète et son livre répondait au nom étrange de Carnaby Street. 
La secte des « panériens » grandit en silence, sans laisser le temps aux cœurs solitaires de se refroidir aux carrefours des rues. Les lecteurs, une lueur spéciale dans les yeux, parlaient d’un rapport mystérieux à Carnaby. La confusion empêchait de comprendre que chaque lecteur s’était transformé en amant. La légende d’un individu déconcertant, espagnol par-dessus le marché, qui avait assisté à la « Première à Londres de Mary Poppins » et qui, probablement, connaissait Syd Barrett de Pink Floyd, circula jusqu’au paroxysme. Certains jours, à certaines heures, un jeune homme s’approchait du kiosque en chuchotant quelques mots comme une oraison. Les libraires ne comprenaient pas. Lui, désirait ardemment, peut-être même sans avoir feuilleté les pages de « Tarzan trahi » ou de « Autres poèmes », un livre intitulé Así se fundó Carnaby Street. On était en mars de l’année 1970. "
Jordi Jové, extrait de « Así se fundó Leopoldo María Panero », 1986. 

L'auteur 
 
photo : Cèsar Malet (1970)
Leopoldo María Panero (1948-2014), fils d’un poète officiel du franquisme, a été poète, traducteur, nouvelliste, essayiste. À la parution de Así se fundó Carnaby Street, l’auteur a 22 ans et déjà, derrière lui, toute une vie d’écriture et d’expériences-limites : il a connu les geôles de la dictature pour agitation politique, l’internement psychiatrique pour consommation de stupéfiants, plusieurs tentatives de suicide, l’alcoolisme... À partir des années 80, diagnostiqué schizophrène, il séjourne, sans interruption et jusqu’à sa mort, dans différents asiles de fous (l’écrivain récuse la dénomination « hôpital psychiatrique »). Figure à la fois isolée et majeure des Lettres espagnoles, poète autodestructeur à l’humour subversif, qualifié souvent, à tort ou à raison, de maudit, Leopoldo María Panero est à lui seul un phénomène culturel et intellectuel qui fascine plusieurs générations de lecteurs, fous et moins fous. Son œuvre, abondante, témoigne d’un engagement, d’une intelligence et d’une culture qui expliquent sans doute la place singulière qu’il occupe dans son propre pays, hors de toute filiation et communauté poétiques, malgré l’amitié fidèle, entre autres, d’un poète de l’envergure de Pere Gimferrer.


Revue de presse 

« S’appuyant sur une redoutable maîtrise de ce qu’on ne nomme pas encore, en ces années-là, la "pop culture", Panero cultive une vision à la fois hallucinée et affûtée de la mort programmée des rêves d’enfance et de la dissolution mercantile qui s’annonce déjà sous couvert de "libération". » 
Hugues Robert, librairie Charybde, 5 juin 2015. Lire tout l'article 
  
«  Le monde de Panero ressemble à ces coffres de jouets dépareillés permettant aux enfants d’improviser des histoires avec une poupée, un GI Joe et trois petits soldats ; ou mieux encore, de ces constructions adolescentes consistant à coller sur un mur articles de presse, morceaux de textes, dessins et photographies en un cadavre exquis toujours en expansion, sorte de témoignage à l’instant T de la construction d’un individu. » 
Julien Delorme, Addict-Culture, 22 octobre 2015. Lire tout l'article
  
« L’écriture relève du poème en prose, dans la lignée d’Aloysius Bertrand, pour les tableaux insolites, de Lautréamont, pour la cruauté ludique et, hors parenté littéraire, d’un Pierre Dac ou d’un Alphonse Allais pour l’esprit nonsensique. Chaque texte semble amorcer un récit ou esquisser un tableau mais c’est pour procéder aussitôt à l’interruption, à l’effacement, à l’autodestruction. » 
Michel Ménaché, Europe n°1041-1042, janv.-fév. 2016. Lire tout l'article 
  
« Critique et mélancolique, riche et déjanté, maudit et iconique : tel est, à l'image de Leopoldo María Panero, Ainsi fut fondé Carnaby Street. Recueil poétique et geste politique sous ses airs publicitaires et fragmentés, provocateur et polémique sous ses dehors légers, britannique et hispanique de cœur et d'âme, ancré et déraciné, marqué par son époque et ses origines, manifeste d'une jeunesse perméable et réfractaire asphyxiée par le régime et attirée par l'appel d'air de l'étranger, fatiguée du franquisme et éreintée par le divertissement. » 
Eric Darsan, 19 février 2016. Lire tout l'article 
  

10 sept. 2015

Quoi faire | une lecture d'Éric Darsan


collage (détail) : Valeria Pasina

Alors que vient de paraître en français un deuxième ouvrage de Pablo Katchadjian, le sublime Merci, impeccablement traduit par Guillaume Contré et publié par les remarquables éditions Vies Parallèles, retour sur Quoi faire (Le Grand Os, 2014) que le blogueur Éric Darsan a lu avec un enthousiasme que l'on espère transmissible. Extrait de sa note de lecture : 
« Chacun a peur de soi. Que pourrions-nous faire ? Nous n'en savons rien, voilà le problème. De quoi serions-nous capables ? » La question demeure posée et avec elle, ô lecteurs avisés, celles de la liberté, de la libre pensée, du libre arbitre, autrement dit de la conscience, de la connaissance et du choix, que vous ne manquerez pas de faire vôtres avec ce livre-là. Vif et intelligent, hilarant et touchant, philosophique et poétique - en un mot : incontournable - Quoi faire est aussi un formidable livre politique et libertaire qui sonde la tentation du sabotage et du terrorisme, évoquant l'expérience du Che et rappelant les propos du Weather Underground. Un récit impressionnant qui, sous ses dehors légers, marque durablement.  
Éric Darsan. 4 septembre 2015. Lire la note complète 

 
Quoi faire, roman de Pablo Katchadjian (éd. Le grand os, mai 2014)  
traduit de l'espagnol (Argentine) par M. Gómez Guthart et A. Diaz Ronda.



7 sept. 2015

Chez René / Cave-Poésie, Toulouse




Le plus GRAND PETIT SALON des éditeurs indépendants de Midi-Pyrénées 

Du vendredi 18 au dimanche 20 septembre 
à la Cave-Poésie René Gouzenne à Toulouse
  
Le Grand Os y est tout le week-end avec ses livres et participe à la programmation : 
• Samedi 19 sept. : 11H30 | À la découverte de Leopoldo María Panero 
LECTURE/RENCONTRE autour de l’œuvre du poète publiée aux éditions Fissile et le Grand os
Avec Cédric Demangeot, Aurelio Diaz Ronda et Victor Martinez.
À l'occasion de la sortie de "Ainsi fut fondée Carnaby Street" de L. M. Panero (Le grand os, 2015) 
• Samedi 19 sept. : 15H30 | Rencontre discussion autour de la TRADUCTION 
Table ronde avec Inge Kresser, Danièle Faugeras (Po&psy), Muriel Morelli (Anacharsis), Aurelio Diaz Ronda (Le Grand os), Victor Martinez (Fissile), Luana Azzolin (Tupi or not Tupi)…
• Samedi 19 sept. : de 15h à 17h | Le Tarot des fétiches 
par En compagnie des barbares (Sarah Freynet). 
Dépliez vos mains, ouvrez vos chakras, Madame Sarah, cartomancienne de charme, vous lit l’avenir avec un jeu de cartes un peu spécial : le Tarot des fétiches. À chaque carte correspond un poème d’Ana Tot, ce qui transforme ce vrai-faux tirage de tarot en découverte d’une écriture poétique saisissante de mystère et d’humour. 



Programme complet

Entrée libre 

6 juin 2015

Marché de la Poésie 2015 / Paris




Rendez-vous sur le stand samedi 13 juin avec :

G. MAR 
14h-16h

 
 
Laurent Albarracin 
14h30-15h30

 


Place Saint-Sulpice
Paris 6e 
mercredi 10 juin : 14h-21h30
jeudi 121: 11h30-21h30
vendredi 12 : 11h30-21h30 
samedi 13 : 11h30-21h30 
dimanche 14 : 11h30-20h 

Le Grand Os est au stand 205-207


25 mai 2015

Chansons etc / livre-objet

cliquer sur les images pour les agrandir   









Chansons etc
  

un livre d'artiste de Valeria Pasina

(peintures, collages, coutures, objets…) 

sur des courts poèmes d'Ana Tot



création : juin 2014

trente-deuxième ouvrage de la collection Ronda Pasina
format : 12 x 17 cm - 20 pages - en accordéon

exemplaire unique

22 mai 2015

G. MAR | Entretien avec Elise Dussart

Avant de retrouver G. MAR, auteur de Nocturama, en chair et en os devant l'étal du Grand Os au Marché de la poésie à Paris en juin, nous reproduisons l'entretien qu'il a accordé, par écrit, à l'inoubliable journaliste Elise Dussart.
 
© Gaël Bonnefon

(1)

Simple curiosité, pour commencer. Tu publies ton premier ouvrage, The Beat Degeneration chez D-Fiction en janvier 2014. Tu as trente-neuf ans si je ne me trompe et rien à ton actif, même pas un texte en revue. Pourtant l’ensemble des textes qui composent ce recueil fait signe vers une réelle expérience d’écriture, et même traite de l’écriture comme expérience. J’en viens donc à ma question : quelle est ton expérience d’écriture avant cela ?

Ma première expérience remonte à mes dix-sept ans. Je suis assis dos au mur du lycée (à Rouen)… Face à moi le parc intérieur – un morceau de macadam – une touffe d’arbres et un vieux bâtiment du genre maison de maître 1900 servant à l’administration. Effroyable sentiment de solitude suite à une rupture (c’est la Kaddie des textes-rêves, le double visage incarné de la perte). J’entre alors dans un état proche de la catatonie – je ne sens plus mon corps – il ne pèse rien – c’est une expérience de désincarnation : je me vois réellement de dos comme depuis un œil jeté loin derrière moi – quelques mètres (comme il arrive dans les rêves de se voir à distance au centre d’une scène en cours) et je vois le macadam, la touffe d’arbres et le bâtiment administratif – je suis au centre de cette vision et donc à l’extérieur – les corps qui sillonnent physiquement la cour ne sont pas vus – ils ont disparu – le bâtiment dos auquel je suis assis est perçu complètement vide (ce qu’il n’est pas) – cette vision semble durer des heures… Ma première expérience est une tentative pour rendre cela par écrit – la description de cette redistribution de l’espace depuis un point focal situé hors du corps (spectateur transcendantal, narrateur omniscient) et première déception : la description de cette scène est aussi ratée que celle que je viens d’en faire. C’est une description en surfaces – une description spatiale – géométrique et trop euclidienne – impossibilité de faire passer dans le texte l’intensité du vécu lié à cette expérience (l’intensité des affects en proie aux impressions de vide – l’étrangeté vécue du sentiment de désincarnation – et toutes les souffrances en concrétion de la perte qui en sont sûrement l’événement déclencheur…etc.). Face à ce manque de faculté descriptive en intensités j’abandonne tout projet d’écrire. Ma première expérience d’écriture est donc celle d’une perte des puissances d’affection dans la lettre. Celle d’un amour déçu… Seconde expérience d’écriture – 25 ans – élément déclencheur : l’énormité du sentiment amoureux (G., source réelle de devenirs polymorphes…). Sa rencontre prend l’allure d’une nouvelle reconfiguration de l’espace sous le poids des affects – l’écoulement du temps est lui-même perçu avec le sentiment du nouveau et c’est des pans entiers de plafonds qui s’effondrent avec leur plâtre à la tangente de deux fronts dans une chambre d’hôtel – des planchers qui ploient sous des avalanches de sentiments – la déflagration des kinesthèses et l’unité du monde coercitif avec elles – l’espace vécu réduit au sans contour de la couleur rouge – le corps-parlant qui se découvre incroyablement grandi (et comme hors-peau) – le battement du temps à l’unisson de deux pouls plus fort que celui que scandent les horloges atomiques…etc. Tout cela mis en mot avec l’intensité adéquate à l’expérience qu’ils transcrivent mais alors… dans une langue totalement inaudible. Je ne fais qu’écrire des trucs illisibles (ou qui ne peuvent être lus que par celle qui, justement, partage mon expérience, dans une sorte de solipsisme à deux). L’amour et son langage propre sont étrangers à toute communauté (de mœurs et de langues). Ce qu’il me reste aujourd’hui de cette expérience c’est que l’écriture, dans son aspect sauvage, comme l’amour donc (mais aussi comme l’enfance qui est le temps des intensités et du nouveau), se tient essentiellement hors-la-loi, au sens où elle ne peut être prescrite par quelque communauté légiférante que ce soit. A commencer par celle des vieilles énormités crevées et leurs palmes académiques jusqu’à leurs imitateurs contemporains et leurs penchants pédantesques pour l’unique et fédérateur mainstream générationnel. Ecrire réclame cette surdité aux attendus tyranniques de la forme. J’essaie d’écrire amoureusement dans ce sens-là.

Et rien d’achevé dans tes archives ?

J’ai brulé beaucoup. Pas par esprit romantique, mais parce que je suis un insatisfait compulsif. Je pense d’ailleurs que se lancer dans l’écriture provient d’un certain principe d’insatisfaction à l’œuvre, ne serait-ce qu’à l’égard du monde tel qu’il est, quelque chose des puissances morbides jetées vers l’extérieur comme une perpétuelle envie de meurtre ou d’incendies. Après ça m’est passé. Reste que le temps de vie moyen d’un texte est d’environs quinze jours. Passé ce délai j’y reviens comme à un cadavre. L’ensemble a perdu l’intensité première avec laquelle sa composition a été vécue. Mais au lieu de les ensevelir pour de bon comme avant je les stocke, nourrissant certainement pour eux quelques espoirs de résurrection… Ce qui arrive d’ailleurs assez souvent. D’où cette idée souvent entrevue d’une coïncidence entre le travail d’écriture et le projet maladif du Dr. Frankenstein. Faire vivre des morceaux de trucs morts en les faisant tenir tout d’une pièce dans le corps du texte. Cela renvoie à une sorte d’intuition que je n’arriverai pas à développer. Pour le dire de la manière la plus succincte qui soit : vivre et mourir sont les deux souffles continus de l’écriture.

(2)

Expérience, vécu, intensités, résurrections, amour, métamorphoses, devenirs polymorphes… ce vocabulaire est récurent chez toi. Dans sa préface à The Beat Degeneration Michel Ennaudeau parle de tes textes comme motivés par un « vivre-écrire-aimer ». Est-ce que tu te reconnais dans ces mots ?

Evidemment ! Il y a là comme une trinité vivante. Indissociable même. Mais comme chez les Chiites j’y ajouterais un prophète caché. Thanatos. Ou Hadès… voire Gorgone. Reste que tout cela est très lié. Je suis en train de lire le Journal de Kafka. Quand il parle de son expérience d’écriture il y va chez lui de questions de forces (voire d’intensités). Soit il n’a pas la force nécessaire à produire la moindre phrase et sa vie lui paraît un désastre – des idées de suicides l’habitent alors. Soit ses phrases le subliment (lui-même, en tant qu’il en est l’auteur), ou plutôt, elles opèrent en lui quelques processus de transfiguration qui accroissent le sentiment de sa propre existence, lui confèrent un surplus de vie (un plus d’intensités). Par exemple quand il dit : « Intrépide, nu, puissant, surprenant comme je ne le suis d’habitude que lorsque j’écris ». Voici son corps glorieux, et ce corps transfiguré est trouvé dans l’écriture (et non dans les Écritures soit dit au passage). Or ces phases d’exaltations et d’expériences moribondes, comme celles de la monotonie, du vide existentiel, de l’impuissance à écrire s’alternent de manière essentielle – par intérim – et scandent le tempo propre à toute existence. Des hauts et des bas antithétiques ont lieu dans un seul et même être (lieu d’envols, de dépressions et de turbulences au passage de l’un à l’autre…). Bref, la vie d’un individu semble être une succession de petites morts et de résurrections, de gouffres et de pics formant un long oscillogramme le long de cette flèche par laquelle on représente le temps. Chez certains, l’écriture est le moyen par lequel s’opèrent ces résurrections. En même temps, pas de résurrection sans mort préalable (de ces petites morts qui, accumulées, font une vie). Il y a entre elles une réelle accointance. Une familiarité même.

Venons-en à la publication de ton recueil, Nocturama, aux éditions Le Grand Os, plus proche de toi… Celui-ci est sous-titré Texte-Rêves et Hypnagogies, termes qui font référence à deux types de textes j’imagine. Est-ce que tu pourrais expliquer leurs différences ? Et surtout expliquer ce que tu entends par hypnagogies.

Les textes-rêves proprement dits sont des textes écris sur le mode de l’élaboration secondaire si l'on veut, avec volonté de tirer au réveil l'ensemble des fragments mémorisés du rêve (de manière anarchique, séquentielle, et donc incomplète) vers la forme (imparfaite) du récit. Par exemple, L'Heure des Nations a été composé dans ce sens là. Les textes hypnagogiques puisent quant à eux dans des expériences hypnagogiques réelles, il s’agit d’états de conscience intermédiaires entre la veille et le sommeil propice à la production de troubles sensoriels dont l’une des caractéristiques est la non dissociation entre rêve et réalité – le sujet ayant durant cette phase d’endormissement (ou de ré-endormissement) encore accès à ses cinq sens, mais alors en proies à toutes sortes de dérèglements mêlant perceptions concrètes, souvenirs empiriques et hallucinations d’une intensité visuelle réellement incroyable. De ce que je peux en dire, l’une des impressions récurrentes qui se produit dans ces états c’est que le monde des sens – sa présence – s’écroule – pour se diluer dans l’espace nocturne – sans repères spatio-temporels – avec pressentiments récurrents de mort imminente. Tout ce qui est perçu dans ces états se voit redistribuer selon des logiques imprévues qui font fi (voire feu) des attendus de la forme narrative. Maintenant, pour être honnête il n'existe pas de texte hypnagogique pur, au sens de : qui transcrivent en l’état le vécu propre aux états hypnagogiques et leurs différents contenus. Pour deux raisons. D'abord parce qu'intervient, je dirais à mon insu, le travail d'écriture (et donc là encore, une certaine forme de réélaboration). Ensuite parce que l'expérience, la manière, l'intensité et la force d'impression des images telles qu’elles ont été vécues ne trouvent pas à se dire dans notre chère langue à l'état brut. J'ai dû  chercher des subterfuges, ou plutôt des manières d'écrire (des formes) qui collent (au moins sur le plan structurel) à ces expériences et soient capables d'en témoigner (bien que franchement indescriptibles). Par exemple, toutes les sensations liées à l'épreuve d'une dématérialisation du corps-propre et autres expériences d'ubiquité dans certains états hypnagogiques – il n'existe pas d'images pour cela, pas d’expérience commune, communicable, et donc pas de mots (sinon des concepts –  vides – car désaffectés – qui ne conviennent pas à l'écriture littéraire). Ça me fait penser à ce que dit Blanchot à propos de Kafka, que je lis parallèlement au Journal en ce moment, et que j’ai envie de citer parce que ça fait écho à la manière dont je vis les choses, réellement : « Il semble que la littérature consiste à essayer de parler à l’instant où parler devient le plus difficile, en s’orientant vers les moments où la confusion exclut tout langage et par conséquent rend nécessaire le recours au langage le plus précis, le plus conscient, le plus éloigné du vague et de la confusion, le langage littéraire. » Et voici ce qu’il ajoute, qui fait écho aux questions-réponses précédentes je pense : « Dans ce cas, l’écrivain peut croire qu’il crée « sa possibilité spirituelle de vivre » ; il sent sa création liée mot à mot à sa vie, il se recrée lui-même et se reconstitue. C’est alors que la littérature devient un « assaut livré aux frontières », une chasse qui, par les forces opposées de la solitude et du langage, nous mène à l’extrême limite de ce monde, « aux limites de ce qui est généralement humain ». »
(3)

Post-scriptum, concernant la manière de témoigner, dans un langage littéraire, de ce qui se donne comme expérience à l’état de confusion (les hallucinations hypnagogiques). J’essaie de trouver, pour les traduire, non pas le bon mot, le mot juste, celui qui colle à la chose (ou l’image), mais le bon groupe de mots avec sa cadence propre, celui qui est à la fois capable de témoigner au mieux de l’intensité visuelle des différents rêves mais aussi et peut-être surtout de leurs vitesses propres.

Justement, tu me tends une perche. Tu parles de cadence. La question du rythme se pose chez toi. Quand on te lit on a l’impression de, je ne sais pas… disons d’être attiré en avant vers des points qui ne sont jamais là où on les attend, et qui reculent sans cesse. S’ensuit un certain vertige, et même de l’inconfort. Quoi qu’il en soit on dirait que tu forces parfois le débit au-delà du naturel.

Je ne sais pas si c’est une critique ou non mais c’est très bien dit. L’un des sens possibles du terme Beat Degeneration (c’est même celui avec lequel il m’apparut), pourrait se traduire par Dégénérescence du Rythme, au sens d’un devenir monstre de celui-ci par lequel le langage lui-même se trouverait en quelque sorte poussé à ses limites, et l’une des limites, naturelle justement, du langage, est celle que lui impose le souffle (que nous n’avons pas continu). Quand j’ai commencé à écrire j’avais en tête ce que dit Flaubert sur la nécessité qu’il éprouvait de soumettre ses textes au gueuloir comme s’il y avait là, dans la mise en voix, tous les réquisits et les canons d’une harmonique naturelle en somme, et, bien sûr, je me suis mis en tête de faire tout le contraire (à cause de sa Bovary que je trouve très réussie, c’est-à-dire : réellement très chiante, et aussi à cause de Pythagore et des pyramides d’Egypte…). J’étais alors mobilisé, corps et âme, à n’écrire que des textes qui, s’ils étaient lus à haute voix nous étoufferaient sur place, le faciès gorgé de sang, le corps pantelant comme après une trop longue transe. Bien sûr, encore une fois, ça donnait de l’illisible (des trucs aussi indigestes que Mongolie, plaine sale de Savitzkaya, que j’ai beaucoup aimé à l'époque, et que je suis incapable de lire aujourd’hui). C’est que j’ai rongé mes freins depuis, mais il doit m’en rester quelque chose comme ne pas manquer d’écrire avec les nerfs quand l’occasion s’en présente. Et puis, mentalement, je débite à un rythme espagnol, au point que mes pauvres lèvres brûleraient si je tentais d’articuler physiquement au même rythme. Quand aux impressions de vertige dont tu parles, c’est drôle mais le dernier rêve plus ou moins marquant que j’ai fait était celui d’une chute où l’on ne tombe pas, une chute sans fin en raison d’une absence totale de sol. Il doit y avoir un lien entre l’usage emballé du rythme et les impressions récurrentes d’effondrement et de fin du monde dans Nocturama j’imagine.

J’aimerais maintenant enchaîner sur des considérations plus satellites si je peux dire. Je pense à l’importance, notée par Romain Verger dans la chronique qu’il te consacre, des références filmiques dans Nocturama. Quel rôle jouent ces films invoqués dans la composition de tes textes ?

A vrai dire, ils ne m’ont servi que d’indicateurs d’ambiances, comme on indique l’humeur d’un personnage entre parenthèses dans les textes de théâtre. Tout le monde associe certaines ambiances à tel ou tel réalisateur, comme un goût propre à telle et telle marque de Cola. Les titres de film font donc référence à des ambiances-types. Ce sont des clichés à connotations esthétiques. Maintenant je ne nie pas une réelle influence de ces films sur la formation de mes textes. J’ai eu la chance de me faire virer définitivement du lycée trois mois avant le bac… La surveillante principale cherchait alors quel élève pourrait intégrer l’équipe du jury lycéen du Festival du cinéma nordique de Rouen. Comme j’étais le plus libre de tous ça m’est tombé dessus et je me suis mangé quatre à cinq films par jour pendant deux semaines, dont la totalité des Dreyer auquel était consacrée une rétrospective. Dans la sélection il y avait ce film de Knut Erik Jensen, un film muet datant de 1993 qui m’a particulièrement marqué et dont on retrouve le titre, Stella Polaris, dans Nocturama. Il y avait tout un tas d’autres films déroutants, voire dérangeants, filmés selon des procédés que je n’avais jamais vus. C’est un évènement marquant dans ma formation culturelle. Avant ça je m’enfilais des Rocky, des Rambo et autres Conan le Barbare en buvant des bières comme un veau avec les larrons qui me servaient alors de copains. J’avais voté pour ce film. Et c’est le film le plus ringard, le plus convenu, une fresque historique sur fond de bourgeoisie, qui remporta la palme…

Tu parles d’écriture comme expérience, mais je me rends compte que ton écriture puise elle-même dans ton expérience. Comme s’il y avait un va-et-vient continu entre ces deux plans : l’expérience (vécue) sur laquelle s’appuie ton écriture, et l’écriture comme ce qui procure, par sa pratique, une autre expérience, je dirais bien une expérience de la transformation, ou de la transfiguration (à commencer, peut-être, par celle de ce vécu lui-même). Est-ce qu’il y a d’autres évènements marquants comme celui dont tu viens de parler qui ont influencé, de près ou de loin, ton écriture ?

A y réfléchir, oui. L’histoire du festival ce n’est qu’une anecdote à côté… A dix-neuf ans je rencontre une Ukrainienne. Appelons-là Iliona. La mort avait germé en sa chair pourtant jeune, laissant à sa surface comme un vide. C’était trois ans après la catastrophe de Tchernobyl… je n’en dirai pas plus, par respect pour elle, pour qui j’ai beaucoup d’estime. La seule chose à retenir c’est que je suis entré en contact, physiquement, avec les effets de l’histoire sur les corps (et forcément les âmes). C’est une chose d’avoir entendu des histoires (furent-t-elles proches de nous, je pense aux histoires familiales) – et c’est autre chose de voir, et même toucher, sur un corps, l’emprunte réelle de l’Histoire, sa marque indélébile, ses capacités de carnage. Cette sorte d’incarnation de l’Histoire, la manière dont elle investit les corps m’apparût (étrangement) dans la négation même de la chair – sous les traits d’une amputation, d’un manque, d’une soustraction ontologique opérée sur un être charnel. L’Histoire, elle, n’a pas de corps. C’est de l’énergie, et même du pulsionnel. De l’inhumain au sens négatif du terme. De la désaffection à l’état pur (c’est-à-dire de l’événementiel sans l’homme). Après ça, j’ai eu l’occasion de m’occuper durant deux mois d’une vingtaine d’enfants de Tchernobyl. Récemment j’ai fait mes comptes. Compte tenu de leur espérance de vie ils doivent tous être morts à cette heure. Ou presque… 
 
Le Grand Os, nov. 2014. Collection Poc !