8.
C’est la ressemblance de la table à la table
Qui la pose comme table
Avec cette assise particulière de table,
Large, puissante et sereine,
Avec son menton déterminé de table,
Sa conformité à sa loi de table,
Cette façon de ne pas déroger à la table,
Son poing de table sur la table au besoin,
L’éclaircissement des choses qu’elle est comme table.
Elle joue cartes sur elle,
Franche du collier et du tablier,
Et cette ressemblance à la table
Est un fait de table,
Une sorte de martèlement
Très doux et très lent
Auquel on peut croire,
Sur lequel il faut tabler même
Pour avancer vers elle,
Vers le pont qu’elle est,
Le pont qu’elle est vers elle
Et le pont qu’elle est en elle,
Le grand écart qu’elle est entre le grand écart et elle,
Qu’elle réduit à rien
Dans une sorte d’évidence
Qui est l’évidence de la table et la table de l’évidence
Et qui fait qu’on peut se fier sans bornes
À ses quatre pieds de table
Et sa bonne vieille tête de table.
Laurent Albarracin
Huitième parmi les "22 arcanes majeurs de la Réisophie qui
est la gnose des choses et la vraie science des objets", ce poème est extrait de Res rerum, de Laurent Albarracin, à paraître en juin 2012 dans le numéro 5 de la revue LGO.
Dessin de Valeria Pasina, extrait lui aussi du numéro à paraître.
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